Résilience et Synergies
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Aperçu : La transformation du système agroalimentaire est une priorité face au changement climatique. Or, la France et l'Europe disposent d'un vivier de compétences et d'entreprises à même de prendre une position stratégique à l’échelle internationale. Nous lançons donc officiellement un appel à convergence pour que cet écosystème se fédère aujourd’hui en vue de résister aux chocs de demain.
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En janvier 2020, le « modèle agricole » en France est « arrivé à bout de souffle » estimait Elisabeth Borne, ex-ministre de la Transition écologique. En février 2020, à l’occasion de l’ouverture du salon de l’agriculture, Emmanuel Macron déclarait : “Notre modèle agricole doit changer”. Mais pourquoi inviter notre pays à changer de modèle ?
UN SYSTÈME AGROALIMENTAIRE... AMÉLIORABLE
La raison derrière ce besoin de changement repose sur des faiblesses caractéristiques de notre modèle agro-industriel.
L’agriculture française est fortement émettrice de gaz à effet de serre : 16,7% d’équivalent CO2 en 2017 (AEE). D’ici 2050, Météo France annonce des canicules deux fois plus fréquentes ; c’est-à-dire, en bout de course, des baisses de rendements agricoles. Notre modèle de production alimentaire est responsable d’un appauvrissement de la qualité des sols et de l’eau – la part relative de l’agriculture dans la pollution des eaux est évaluée à 50% (DREAL). L’épandage de pesticides dans le secteur agricole favorise l’apparition de graves pathologies : cancers, maladies neurologiques, troubles de la reproduction (INSERM). Elle est l’une des premières causes du déclin de la biodiversité (IPBES). Enfin, la baisse du nombre d’actifs agricoles (Insee) au regard du probable déclin de l’approvisionnement en pétrole de l’UE d’ici 2030 (The Shift Project) pourra entraîner de fortes tensions sur la production.
Face à ce constat peu réjouissant, deux points sont à souligner : 1. les agriculteurs ne peuvent être tenus responsables de cette dynamique systémique ; 2. la pression ne peut et ne doit pas être exercé sur eux. En l’occurence, l’aval de la production a les moyens de se mobiliser à l’heure où un nombre croissant d’acteurs entreprenants éclosent. Des grappes d’initiatives en matière de résilience ne cessent de germer sur le territoire français et obtiennent un écho de plus en plus favorable. Des initiatives, en somme, qu'il convient de faire converger au service d'un seul but : la lutte contre le changement climatique et la résilience alimentaire.
AGRICULTURE ET INDUSTRIE AGROALIMENTAIRE : UNE SYNERGIE OBLIGATOIRE POUR UN CHANGEMENT DE GRAND AMPLEUR
La massification des pratiques agroécologiques pour rendre notre agriculture résiliente est largement plébiscité par des organismes de renom comme la FAO, le GIEC, l’ONU, The Shift Project. C’est un axe majeur de développement comme l'a rappelé dès 2011, Olivier De Schutter, rapporteur spécial de l’ONU sur le droit à l’alimentation : “Les preuves scientifiques actuelles démontrent que les méthodes agroécologiques sont plus efficaces que le recours aux engrais chimiques pour stimuler la production alimentaire”.
Mais vouloir changer notre agriculture en faisant peser l’effort sur les agriculteurs seuls, c’est freiner le changement en se privant des moyens de l’aval – industriels en premier lieu. Ces derniers peuvent, à leur échelle, engager des mesures décisives et rapidement applicables : mieux sélectionner leurs matières premières (produits biologiques et proches du lieu de transformation) ; améliorer le pilotage de leurs procédés de production (moins énergivores et moins émetteurs de GES) ; et recourir à d’autres emballages et modalités de transport (plus d’éco-emballages et de distributions locales).
Loin de s’exclure, agriculteurs et industriels composent ensemble. Les efforts entrepris en industrie aident l’agriculture à se transformer, et vice versa. Les industriels peuvent effectivement faciliter la conversion des modes de production agricole. S’ils intègrent des aliments bio-sourcés ou développent de nouveaux produits sans pesticides, ils deviennent un soutien.
La situation s’avère gagnant-gagnant. Mais comment accompagner l’industrie agroalimentaire à s’adapter aux changements induits par l’agriculture ?
RESILIENCE AGROALIMENTAIRE : QUEL RÔLE PEUT JOUER L’INDUSTRIE ?
Parler de résilience ne suffit pas. Il faut répondre à la question “pour quoi ?”, “à quelle fin ?”. Rendre les industriels plus résistants aux crises sans changer notre agriculture ne résoudra pas les problèmes évoqués en début d’article. En revanche, aider les industriels à se transformer pour rendre toute la chaîne agroalimentaire plus résiliente est une voie d’amélioration viable et enviable.
Dit autrement, il s’agit de permettre aux industriels de transformer leurs activités (pour continuer de nourrir chaque citoyen malgré le dérèglement climatique), et en se transformant, de faciliter la conversion de notre système agroalimentaire (le stabiliser, le “dé-vulnérabiliser”).
Il existe un certain nombre de méthodes pour parvenir à cette transformation de notre industrie. Les deux principales portent sur la confection des produits industriels et la garantie de production. La première méthode passe par la capacité à formuler de nouvelles recettes. La seconde méthode repose sur un suivi de la production.
Formulation de nouvelles recettes : Il est aujourd’hui possible de prévoir les effets d’un ingrédient alternatif (ex. bio-organisme), c’est-à-dire de tester ses impacts sur toute la chaîne de production par simulation avant de lancer un plan-test. La formulation de nouvelles recettes devient ainsi un outil de transformation majeur des processus industriels.
Recommandations de pilotage et suivi de la production : Au-delà de la création de nouvelles recettes, il s’agit également d’identifier les meilleurs réglages pour garantir la qualité d’un lot de production à un coût maîtrisé (moins d’énergie consommée, moins de pannes, moins de rebuts). Ajoutez à cela un suivi des processus de production par collecte et analyse des données, et vous permettez alors à un industriel de sécuriser ses phases de production.
En résumé, recommandation de recettes et suivi en temps-réel sont deux leviers pour aider à transformer les activités industrielles de manière pérenne en vue d’un changement de modèle agroalimentaire. Mais cet effort sera insuffisant si on ne crée pas de synergies entre production et transformation d’une part, et transformation et distribution d’autre part.
LA COOPÉRATION COMME MOTEUR DE LA TRANSFORMATION
Pour donner quelques exemples concrets, ces synergies que nous appelons de nos voeux visent à ce que les industriels intègrent davantage de produits biologiques et plus locaux, conditionnent leurs biens dans des emballages biosourcés et les distribuent plus proches du lieu de fabrication.
Nous voulons porter l’ambition de bâtir l’agroalimentaire de demain à plusieurs.
Que diriez-vous si l’on vous annonçait que des plantes peuvent dépolluer nos terres cultivées en y extrayant des métaux lourds ? Que de l’engrais organique à base d’insectes peut remplacer des intrants pétrochimiques ? Que des alternatives de production alimentaire peuvent fournir en quantité industrielle des produits très nutritifs, accessibles à tous, en circuit court et avec une garantie d’approvisionnement toute l’année ?
Et qu’en est-il de la fin des emballages plastiques composés de pétrole au profit de biomatériaux ? Quid de la réutilisation de contenants alimentaires grâce à des centres de lavage ? Que pensez-vous de points de collecte et de compostage de déchets alimentaires valorisés en biodéchets ?
Toutes ces initiatives existent et sont françaises !
Nous lançons donc aujourd’hui et maintenant un appel à convergence à ces entreprises qui se reconnaîtront facilement. Nous voulons fédérer cet écosystème prodigieusement complémentaire et cohérent car face à l’urgence climatique nous avons les moyens de notre espérance.
Alors qui que vous soyez, manifestez votre enthousiasme et répandez le mot en soutenant notre initiative sur les réseaux sociaux.
Nous dévoilerons dans les prochaines semaines les fruits de cet appel à convergence en vous partageant les actions concrètes que nous entreprendrons et les entreprises ayant décidé de répondre à notre appel.
D’avance, un grand merci à tous !